On NOUS a attaqué
Parlant du 11 septembre 2001, je me souviendrai toujours de cette discussion que j'ai eu peu de temps après les événements avec un ami québécois. Ce dernier de me dire "On NOUS a attaqué". Sur le moment, je n'avais pas relevé plus que cela la formule. Ni tenu à lui demander de préciser sa pensé. Mais l'expression, et surtout l'emploi de ce "nous" avait attiré mon attention. Car "nous" qui? Nous quoi? Nous occidentaux? Nous nord-américains? Nous, notre civilisation? Et cette expression de me permettre tout à coup de toucher du doigt ce paradoxe qui flotte au Québéc vis-à-vis des voisins du sud. Car autant les Québécois (et là je parle surtout des francophones) font tout pour se distinguer de la masse étasunienne, autant il fait parfois bon se trouver sous le "parapluie américain", qui assure notamment les beaux jours des entreprises canadiennes. Oui, Montréal a rassemblé, dans les semaines précédant l'intervention américaine en Irak, l'une des plus importantes, si ce n'est la plus grosse manifestation anti-guerre d'Amérique du Nord. Oui, Bush est surtout perçu comme un "moron" (abruti) de première. L'expression n'est d'ailleurs pas de moi, et avait été proférée, non sans remous ultérieurs, par la conseillère en communication de l'ancien premier ministre canadien, Jean Chrétien, lors d'un dîner officiel. Alors oui, les gens des "Etats" comme on dit, ne sont pas comme "nous". Et en même temps, on "nous" a attaqué... Que comprendre? Parce que même si l'expression "nous sommes tous des Américains" chère à Jean-Marie Colombani a résonné dans les chaumières françaises au lendemain de la tragédie, l'identification au peuple américain n'est pas vraiment apparue à l"époque en France comme allant de soi.
Ce "nous", je ne le juge pas. Je le comprends même. Mais c'est dans ce genre de situation que je ne peux que constater que je suis et resterai toujours quelque part, et malgré cet amour que j'ai pour Montréal, le Québec et les Québécois, une sorte de produit importé, un frenchie. Avec mes propres valeurs, bonnes ou mauvaises.
Enfin, pour clôturer cette page WTC (oui, promis, j'en parle plus après), je voulais juste revenir sur une petite anecdote bizarre, qui remonte précisément au 11 septembre 2001. Je travaillais à l'époque comme journaliste pour le site internet du journal Le Monde. Il faisait beau, une belle température de septembre. Nous avions décidé avec quelques collègues d'aller prendre un sandwich près du Canal St-Martin sur l'heure du lunch. Il était un peu avant 14 heures. Et là, dans le ciel parisien, à une altitude qui m'est apparue relativement basse, je vois passer un avion de ligne. Surpris et étonné, je le fais remarquer à mes collègues en leur disant, le sourire en coin : "va falloir pister les dépêches cet après-midi"... Et de leur lancer pour plaisanter : "Crash sur la Tour Montparnasse", du nom de cette tour, la plus haute du centre de Paris.
Quelques minutes plus tard, vers 14 heures et des poussières, nous remontons dans les bureaux, notre lunch terminé. Et là, tout le monde autour des télés, une des tours en flammes... "Qu'est-ce qui s'est passé?" demande l'une des personnes qui était avec moi. "Un avion vient apparemment de s'écraser dans une des tours", lui répond-on. Je regarde alors ces mêmes collègues qui étaient descendus avec moi... Ils me regardent à leur tour, me dévisagent presque, l'air incrédules, presque méfiants, comme si j'avais revêtu les plumes d'un oiseau de malheur. Le crash avait bien eu lieu, mais pas sur la Tour Montparnasse...
Wow, on dirait du Pierre Bellemarre mon histoire!!
Aller hop, terminé le WTC.