Un Quick and Toast please, et que ça speede!!
Samedi, il fait beau, et l'appel du ventre sur le coup de midi me ramène à l'esprit une enseigne de restaurants rapides bien connue des Français : le Quick. Fondé en 1971 en Belgique, Quick Restaurant n'a eu de cesse d'essaimer un peu partout, tentant tant bien que mal de faire de l'ombre au géant McDonald's, qui n'en est pas à un erzatz près.
Afin de calmer mon envie pressante, je prends donc la direction d'un Quick situé en périphérie de Bordeaux, à la sortie d'un centre d'achat. Il est 13h40, l'affluence n'est pas des moindres. Au comptoir, une dizaine de personnes attendent à chaque file, ce qui me laisse donc tout le temps pour choisir calmement mon menu, prendre connaissance des dernières créations quickesques, et préparer mon estomac à l'assaut qui promet d'être sauvage. C'est alors qu'un doute m'assaille : le menu semble être rédigé en anglais.
Côté burgers, on trouve donc : le Giant, le Suprême cheese, le Quick'n Toast, le Long Bacon, le Long Chicken, et son pendant iodé, le bien nommé Long Fish. Diantre, que d'anglicismes... Aller, on continue. Voilà les Cheesy, "délicieux beignets au fromage". Donc, ce sont bien des beignets au fromage. Ensuite, viennent les "Chicken Dips", suivis des "Chicken Wings". C'est pas fini : le "Softy Max" arrive pour le dessert, sans oublier les "Donuts" et "Crumbles" aux pommes.
Jamais l'invasion de mots anglais ne m'était parue aussi évidente. Mon passage pas la case Québec y est sans nul doute pour quelque chose, mais tout d'un coup, le décalage me saute à la figure. Autant pour le nom de hamburgers, la traduction n'est pas aisée (imaginons deux secondes commander un "Long poisson", ou un "Rapide et rôti"... pas crédible). Mais pour le reste, quel intérêt de renommer des ailes de poulet "Chicken Wings", les croquettes "Chicken dips", ou une putain de banale glace à l'italienne à la vanille "Softy Max"? A bien y penser, dans les McDo français aussi, on peut commander des "Chicken Mc Nuggets", en plus de son menu "Best of", mâtiné de salade "Chicken Taboulé" (bien malheureux mélange sémantique arabo-anglais).
Au Québec, la lutte contre la langue anglaise est un combat de tous les jours, une question de survie. En France, injecter de l'anglais à tort et à travers, c'est juste une question de "fun". Une appellation anglaise, ça fait "cool", surtout s'il s'agit d'un hamburger.
L'histoire me rappelle l'anecdote racontée par le journaliste québécois Jean-Benoît Nedeau, auteur de "Les français aussi ont un accent", chez Payot. Un jour de forte chaleur, il entre dans une boulangerie française et demande à la brave dame derrière son comptoir un thé glacé. Elle lui répond qu'elle n'en a pas. Pourtant, dans la vitrine réfrigérée derrière elle, il y en a bien plusieurs canettes. Il lui fait remarquer, et c'est alors qu'elle s'exclame : "Ah, mais c'est un "Hiss-Ti" (Ice tea) que vous voulez, fallait le dire de suite!"...